Professeur en perdition [ PV: Yoshihiko Kuroda]

Yasuo installa la pancarte qu’avait préparé Natsua. Un « Bienvenue » fait en fleur au centre ainsi qu’un « Veuillez attendre un membre de l’administration ici » en lettres d’or.
Yasu souffla. Craqua ses doigts. Bailla. Tripota ses longs cheveux améthyste.
C’était un réflexe de comparer les couleurs avec celles des pierres semi-précieuses.
Il avait un peu le trac. Les directrices l’avait envoyé chercher de nouveaux élèves. Trois étaient déjà arrivés. Trois filles. Dont une qui participerait à ses cours d’herborisme. Qu’allait-il faire ? Avec une seule élève ? De la soupe aux orties ? De la divination par les pierres ?
Oui. C’était sans doute le mieux à faire. Il fouilla dans la poche de son pantalon noir et en sortit un quartz rose. Le professeur joua un peu avec admirant ce minéral symbolisant l’enfance, l’imaginaire et les arts. Une pierre rose. Avec ça il avait de quoi emballer Natsua, la directrice, qui semblait être une Pink addict. C’était mignon. Mais fallait qu’il se méfie. La chasse à Natsu-chan était gardée. Miki, tel un cerbère paraissait surveiller tous les gestes et paroles ayant un lien quelconque avec sa supérieure. On n’était pas dans la mouise. Si on peut plus draguer tranquillement où va-t-on ?
Pour se faire bien voir, il s’était habillé chic. Une belle chemise à jabot de dentelle. Dommage, Ashigaru avait eu la même idée. La loose.
Et maintenant il était en train d’attendre des gamines ou... Des mecs ? Autant les adolescentes ça ne le branchait pas, par contre les adolescents... De beaux éphèbes, tout frais, innocents etc... Mais... A quoi il pensait là ? On dirait un vieux pervers ! D’un autre côté... Les femmes l’avaient tellement déçu. Bande de Saloperies. Et encore il était sympa.
Il chercha dans sa poche gauche et sortit un étui à cigarettes. Il en prit une. La tritura. La porta à sa bouche. Puis la rangea. Au fond, il savait qu’il y avait des détecteurs de fumée partout dans l’établissement. Faudrait qu’il aille voire si on pouvait accéder aux toits facilement. Au moins il aurait peu de risques de se faire choper pas cerbère.
Il avait envie de fumer.
Il sortit un chewing-gum à la place. Le goût de menthe se propagea lentement dans sa bouche. Il inspira profondément et sentit l’air frais. Il mâcha et gonfla une immense bulle. Il s’était entrainé avec un type assez particulier à son ancien boulot.
Il entendit un bruit derrière lui. Il se tourna bulle de chewing-gum fixée à la bouche. Un jeune homme, face à lui. Grand, plus grand que lui. Un truc pour lui foutre la honte avec son mètre soixante-quinze. De beaux cheveux noirs ébène. En fait l’ébène ne lui correspondait pas, bien que sa beauté soit très froide. Des ravissants reflets violets lui donnaient un air assez... surnaturel. Yasuo déglutit. L’autre se rapprochait. Sa peau d’une blancheur quasi-transparente brillant presque avec la lumière des portes vitrées.
Yasu réussit enfin à se redresser.
-Bien, bienvenue. Je suis professeur d’herborisme et employé au bar du campus. Bienvenue au pensionnat. Euh... Je suis ici pour vous souhaiter la bienvenue.

On avait laissé Dark a plus de dix kilomètres de l'établissement, il avait dû faire le reste du trajet à pied avec sa valisette noire à la main. Pourquoi ? Telle était la question. Mais ce n'est pas Yoshihiko que cela dérangeait, il avait l'habitude de marcher, ou en tout cas de faire fonctionner ses jambes. Lorsque l'on commet quelques crimes, il faut avoir une bonne forme physique, que ce soit pour le vol ou pour autre chose, la prison se joue àl'allure de notre pas de course. (Et a notre capacité à s'éclipser et se dissimuler, mais ceci est une autre histoire)

Il avait donc mis deux heures pour arriver devant ce grand bâtiment, loin de l'esthétique de son ancienne école. C'était même un peu "trop" ! Mais peut importe ! Tout sera mieux que là-bas ! Finit les pions qui surveillent tous nos faits et gestes, les aux fenêtres, le barbelés au sommet des murs ... Un sourire satisfait s'afficha sur son visage trop pale.

Il poussa la porte brutalement, le vent s'engouffra dans le Hall et fit danser un instant ses cheveux. La porte se referma dans un deuxième grand bruit. Un homme plus petit que lui venait de se retourner une bulle de chewing-gum à la bouche. C'était ... pitoyable. Mais il n'était pas si mal foutu que ça. Son style n'était pas terrible, tout ce que Dark avait vu jusqu'à maintenant c'était l'horrible uniforme de son ancienne école et les haillons des habitants de son quartier d'enfance, alors cette étrange chemise, c'était ... trop ! Yoshihiko approcha la tête haute, un pas décidé.

-Bien, bienvenue. Je suis professeur d’herborisme et employé au bar du campus. Bienvenue au pensionnat. Euh... Je suis ici pour vous souhaiter la bienvenue.

Les coins de la bouche de Dark se soulevèrent, les lèvres encore pincées. Ce type avait un regard fuyant, une prononciation décousue, ce n'était définitivement pas un homme, un vrai. Pourtant c'était un ... prof ! Cela allait être amusant ! Il le fixa droit dans les yeux.

"Bien! Bien! Moi c'est Kuroda Yoshihiko ! J'pense que jvais bien m'éclater ici!"

En l’apercevant, ou plus précisément, en apercevant sa chemise, le jeune homme haussa le sourcil droit, visiblement perplexe. Yasuo laissa s’échapper un petit sourire. Elle était belle cette chemise ! Elle avait couté cher à celle qui lui avait offerte. Une fille à Papa qui s’appelait Mayura... Enfin bon, il s’égarait là. Se rappeler de la charmante blonde alors qu’il accueillait son premier élève... Non vraiment ce n’était pas correct.
Yasu réussit le tour de force de ravaler sa bulle de chewing-gum sans que celle-ci n’explose.
Le nouvel élève répondit à ses quatre phrases de bienvenue.
"Bien! Bien! Moi c'est Kuroda Yoshihiko ! J'pense que jvais bien m'éclater ici!"
S’éclater ? S’éclater ! S’éclater... Non, vraiment il se posait la question... Fallait-il qu’il se vexe ? Le nouvel étudiant n’avait certainement pas voulu être grossier ou agressif. Le prof décida ne pas se vexer.
-Euh... Oui c’est bien de vouloir s’éclater. Enfin... Cette école est quand même faite pour étudier. Même si ce sont des matières agréables.
Sur ces paroles, Yasuo récupéra sa pochette en plastique violacé et chercha les trombinoscopes. Ce fût vite fait, il était très organisé. Il chercha la tête du jeune homme dans ses feuilles et crut le reconnaître dans la classe des troisièmes années. La photo ne lui ressemblait pas. Le visage du jeune homme avait les mêmes lèvres pincées, et la même couleur de cheveux mais ces yeux paraissaient tellement colériques et haineux...
C’était vraiment inquiétant.
-Tu... Tu es Yoshihiko Kuroda ? Spécialité : Endurance. Matières: Théâtre, Littérature et Astronomie. Je ne me trompe pas ? Tu as bien 18 ans ?
L’autre hocha la tête.
Bien. Yasuo eut un petit sourire. Yoshihiko... Ce nom lui allait comme un gant. Il était beau. Yasu avait toujours considéré qu’il y avait une différence entre la majorité des gens, qui étaient jolis, et une faible catégorie de personnes vraiment belles. Sans hésiter, Yoshi se trouvait dans ce second groupe.
-Je vais te monter ta chambre, as-tu des questions ?

Vu la tête que le charmant prof venait de faire, les mots de Dark n'avait surement pas du avoir un bon effet. Mais c'était bien le but. Il le reprit. Les cours sont fait pour étudier et non pas pour s'amuser. Oui mais quand on aime ce qu'on fait, et bien on ne travaille pas ! On s'enrichit.

Le prof sortit une pochette violette, chercha une feuille avec une bonne vingtaine de photo, peut être plus. Et là, l'homme aux tifs Violets en regarda une plus particuliérement, puis il changea de couleurs, oui il avait palit très légerement. Ne serait-ce pas la photo de Dark qu'il avait regardé? C'était surement ça. Le sourire de Yoshi marqua son visage. Un sourire satisfait. Comme toujours.

L'homme ne releva pas la tête pour ajouter Tu... Tu es Yoshihiko Kuroda ? Spécialité : Endurance. Matières: Théâtre, Littérature et Astronomie. Je ne me trompe pas ? Tu as bien 18 ans ?

Avait il peur ? Non tout de même pas. Ce serait drole mais c'est un prof. Il ne devrait pas être aussi ... y a t'il un mot pour décrire ça ? Si oui, Yoshi ne le connaissait pas. Comme Dark ne répondait pas il releva les yeux, et vu qu'il hochait la tête.

Je vais te monter ta chambre, as-tu des questions ?

-Nan jcrois pas. Quoi que, Y'a un couvre feux ? Des régles ? Des trucs dans l'genre ?

Yoshihiko arborait un sourire satisfait. Étonnant. Le prof leva les sourcils d’un air interrogateur. Décidemment ce jeune homme était bien énigmatique.
Toujours avec son vocabulaire de bas étage et sa façon de parler particulièrement nonchalante, l’élève lui parla du règlement. Il n’avait pourtant pas la tête à s’encombrer des lois. Qu’elles soient justifiées ou non.
Yasuo se creusa les méninges... On pouvait dire que le règlement était assez souple.
-Voyons... Des règles il y en a, évidemment. Mais elles sont assez... Sympathiques. La règle principale et je cite notre directrice adjointe, « Tout est permis sauf ce qui nuit à autrui ». Au niveau du couvre-feu il n’y en a pas. Les garçons n’ont pas le droit d’aller dans les chambres des filles à partir de 19h pendant toute la semaine et vice versa (oui, le week-end c’est permis). Attention, il n’y a pas de couvre-feu mais si les élèves sont trop fatigués quand ils viennent en cours nous en mettrons un en place alors il faudra faire preuve de maturité. Au niveau de l’uniforme tu dois suivre les consignes de tes professeurs. L’uniforme du pensionnat est (comme tu es en troisième année) turquoise. J’espère que tu aimes cette couleur. Tu dois le porter au réfectoire pour le déjeuner et le diner en semaine. Il y a des uniformes pour certaines spécialités. En théâtre et en endurance par exemple. Ta prof de théâtre sera Mlle Ashigaru la directrice adjointe. J’espère qu’elle te plaira.
Il se rendit compte qu’il avait prononcé cette phrase d’une voix compatissante. Yoshi risquait de se faire du souci. Tant pis. Ah ah ! Il venait de faire trois rimes en « i » !!
Quel sens de la littérature ! Hem... Il fallait se calmer. Penser à autre chose. L’image rose de Natsua apparut dans sa tête. Dans un yukata moulant qui... Oh non ce n’était pas convenable il allait finir pas saigner du nez. Qu’avait il oublié dans le règlement ?
-Euh... Bien entendu tu dois assister à tous tes cours sauf si tu as une raison valable ! Nous allons monter, pour l’instant il n’y a personne dans ta chambre tu pourras donc choisir ton lit. Le trousseau de l’école à déjà été déposé dans ton placard. Tu as besoin d’un coup de main pour porter tes affaires ?
Yasuo passa une main dans sa poche tira son ravissant étui à chewing-gum, l’ouvrit et le présenta au jeune homme
-Menthe verte, tu en veux ?
Puis d’une voix plus virile et provocante :
-Oh... C’est peut-être trop fort pour toi...

-Turquoise ??? Non mais pourquoi je porterais une couleur aussi hideuse ? !!! Et puis je vois vraiment pas pourquoi cte prof me plairait ! Ce sont tous les mêmes !

Le prof/Serveur de bar (il avait bien une tête à l'être d'ailleurs, barman) finit par sourire bêtement, à s'en demander s'il avait écouté ce que Yoshi venait de lui dire. A priori non, puisqu'il reprit son discourt sans même reprendre Dark.

Kimichi lui proposa son aide pour porter ses affaires, avait-il besoin de lunettes ? A part la petite valisette noire, Yoshi n'avait rien apporté.

-Menthe verte, tu en veux ? Oh... C’est peut-être trop fort pour toi...

Yoshi resta bouche bée une demie seconde. Non non il n'hallucinait pas, il avait bien entendu. "C'est peut-être trop fort pour toi ..." Il ria intérieurement. Non vraiment, ce prof n'avait pas été renseigné correctement sur son identité. Dans son ancien établissement il n'aurait surement pas hésité à l'insulter, peut-être même à le frapper. Mais il se contenta de répondre en lui jetant un regard noir:

-Pour qui me prends-tu ? Si j'étais toi, je ferais attention. Je t'aurais prévenu !

A ce moment précis un jeune homme franchissait la porte d'entrée, nous évita pour prendre les escaliers. Pas un mot ...

Yoshihiko râla sur la couleur de son uniforme et sur le fait que toutes les profs se ressemblaient. Vraiment charmant ce gosse...
Le gamin réagit au quart de tour lorsqu’il comprit le sous-entendu du prof. Il paraissait furieux. Yasuo faillit éclater de rire. Des provocations comme ça, le professeur en avait plein les poches. Mais il comptait les utiliser avec parcimonie. Une bagarre était assez mal vue entre un prof et un élève. Pourtant Mr Kimichi était persuadé que ce genre de contact pouvait assainir les relations entre les membres du pensionnat. Si Kuroda lui avait sauté dessus, il aurait été prêt à réagir.
Yoshihiko Kuroda, Yasuo Kimichi... Mêmes initiales et silhouettes quasi-identiques. Des cheveux violets, une stature mince et musclée en finesse. Oui, vivement la baston, ils en ressortiraient tous les deux avec beaucoup de bleus et d’égratignures mais cela promettait.
Tout à coup, un grand blond entra dans le hall, eut un petit temps d’arrêt à leur vue, puis se dirigea lentement, comme s’il glissait sur le sol, vers les escaliers. Yoshihiko et Yasuo le suivirent du regard, les yeux ronds, façon hibou réveillé en plein jour. Euh... Enchanté aussi...
Après un rapide coup d’œil à Kuroda, Le barman du campus s’élança dans la cage d’escalier. Il n’y avait qu’un seul blond sur sa liste. Yasuo cria dans sa direction :
- Agojino Kiyosumi ! Vous êtes priés de descendre et de me suivre dans la chambre 1 des garçons. Vous prenez le chemin du bureau des directrices !
L’ombre du garçon s’arrêta et fit demi-tour. Mais enfin qu’es-ce que cela voulait dire ? On ne trace pas devant un professeur de la sorte ! Il eut presque pitié de Yoshihiko qui risquait de se taper un asocial dans sa classe. Encore que... Il ne faisait pas totalement les mêmes options. Il y avait une chance.
Le suèdois (car pour Yasuo les blonds aux yeux bleus étaient tous suèdois) avait enfin finit sa descente.
-Tu es prié d’être un minimum poli avec les membres de ton pensionnat, lui dit Yasuo d’une voix sèche, je te présente ton colocataire Yoshihiko Kuroda et je suis le professeur d’herborisme et le barman du campus.
Puis il s’adressa aux deux adolescents :
-Avez-vous des question avant que nous nous rendions dans les dortoir ?